Source reprise sur le blog de Nicolas Gary - 07.11.2015
La loi Numérique ressemblera donc à ce que les majors
veulent en faire. Axelle Lemaire avait pourtant bien organisé son
projet, avec une phase de consultation nationale, et d’écoute. Mais
l’article 8 était au cœur d’une bataille qui dépassait de loin les
internautes croyant prendre part à une République Numérique.
Démonstration a été faite que nous vivons dans la République des
Lobbyistes. Et c’est probablement pour cette incompréhension que
l'article a explosé en plein vol, tel un drone approchant l’Élysée...
Pascal, domaine public
Ce 5 novembre, après une réunion à Matignon, consacrée à l’article 8 du projet de loi, certains sont tombés de leur chaise. Allait-on enfin pouvoir octroyer au domaine public une réelle existence, par une définition positive, et l’approche d’un « domaine commun informationnel » ? Du tout. Nenni. Que pouic. La Fondation Wikimedia était en première ligne, et n'en revient pas.
La grande mascarade à Matignon, Valois, et ailleurs
« [A]vant même le début de cette “réunion de travail”, il nous a été précisé que l’article serait retiré du texte général transmis au Conseil d’État », informe Wikimedia. « Nous avons le sentiment de participer à une grande mascarade. Les biens communs sont une réalité sociale, mais il semblerait que les pratiques et phénomènes réellement à l’œuvre dans la société ne soient pas les principales préoccupations des pouvoirs publics. »
Aux z’oubliettes, comme chanterait Benabar.
Dans le projet de loi Numérique, nous avions relevé trois axes essentiels pour l’évolution du secteur du livre. L’article 8 avait pour mission première de prémunir le pillage du domaine public et son exploitation privant ledit public de son domaine. En somme, on parlait de « réappropriation exclusive », ou plus communément connue sous le nom de Copyfraud.
Et cet article 8 faisait peur, d’autant plus que le sujet avait totalement échappé à la rue de Valois, démontrant une fois encore son savoir-faire. Fleur Pellerin avait déjà manifesté un intérêt très relatif pour le domaine public, mais balayé toute idée de légiférer sur la question. Pourtant, voyant qu’Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du numérique s’en emparait, la ministre avait virevolté : elle commandait en express un rapport au CSPLA, sur la question du domaine public informationnel.
La rédaction de l’article 8 n’était que provisoire, et allait encore nécessiter que les différentes parties soient consultées plus en avant. Mais Lemaire entendait bel et bien « protéger les ressources communes à tous appartenant au domaine public contre les pratiques d’appropriation qui conduisent à en interdire l’accès ».
CSPLA : Chacun (bien) à Sa PLAce
Or, contre l’avis du rapporteur Jean Martin, le CSPLA a voté pour le retrait de l’article 8, quasi unanimement. Il confessait alors qui est le réel pilote de l'avion. « Cette tentative de dernière minute de court-circuiter le débat public démontre une fois de plus le mépris des lobbies culturels pour les processus démocratiques », avait lancé la Quadrature du Net, manifestement écœurée.
Contre l’avis du rapporteur, donc, alors même que ce dernier écrit noir sur blanc que l’article 8 n’est en rien problématique en regard du droit d’auteur. « Dans leur rédaction présente, les quatre premiers alinéas du projet d’article 8 (I. 1°, 2° et 3°) donnent une définition du domaine commun informationnel qui ne remet pas en cause le droit d’auteur tel qu’il est protégé par le cadre juridique actuel, et notamment le code de la propriété intellectuelle », écrit Jean Martin. Il y avait donc des intérêts supérieurs en action. Axelle Lemaire n’a pas manqué d’en savourer toute la contradiction :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire